Pour rappel, les Ulis (Unités localisées pour l’inclusion scolaire) sont des dispositifs récents qui datent de 2010 où ils ont remplacé les UPI (Unité Pédagogique d’intégration). Les dispositifs - et non les classes Ulis comme on l’entend encore dire - découlent de la loi du 11 février 2005 dont les trois fondements sont l’accessibilité , le droit à compensation, la participation et citoyenneté pour les personnes handicapées. La loi du 11 février 2005 qui a conduit à un large mouvement de scolarisation des élèves handicapés a dû être consolidée au sein de l’Education nationale par la Loi de Refondation de l’école du 8 juillet 2013. Celle-ci pose à l’article 1 du Code de l’Education le principe de non-discrimination en stipulant que "le service public veille à l’inclusion scolaire de tous les élèves, sans distinction". Elle précise par ailleurs "qu’il convient aussi de promouvoir une école inclusive pour scolariser les enfants en situation de handicap et à besoins éducatifs particuliers en milieu ordinaire. Le fait d’être dans la classe n’exclut pas de bénéficier d’enseignements adaptés et est, pédagogiquement, particulièrement bénéfique. Cette scolarisation au sein de l’école ou de l’établissement permet aussi aux autres élèves d’acquérir un regard positif sur la différence." [1]
Il s’agit donc pour la communauté éducative d’avoir une autre approche de ce que Jean-Jacques Stiker appelle dans son dernier ouvrage "la condition handicapée" [2]. Celle-ci ne doit plus être considérée comme en un échec individuel, mais comme une situation que l’école doit prendre en charge et doit apprendre à gérer - on parle d’élèves en situation de handicap. C’est à la communauté éducative de chercher à s’adapter et à proposer des aménagements pour que les élèves en situation de handicap puissent être scolarisés et réussir au mieux à l’école.
On est donc passé d’une logique intégrative à une logique inclusive qui repose sur un modèle social du handicap qui substitue au retrait de la déficience du champ de l’école, le principe d’acceptation des différences qui serait à même de construire des solidarités nouvelles et une citoyenneté ouverte sur l’altérité. Ces deux lois - celle du 11 février 2005 [3] et celle du 8 juillet 2013 [4] - s’inscrivent dans un contexte européen [5] et international [6] et constituent des avancées sociales et politiques destinées à combler le retard de la France en matière de scolarisation d’élèves en situation de handicap et à besoins éducatifs particuliers.
Ce nouveau cadre juridique et les dispositifs qui en sont issus ont toutefois des effets pervers ainsi que le signalent plusieurs études et articles [7]. Il s’agit de la reconnaissance précoce de handicap par la Maison Départementale des personnes handicapées pour certains élèves de milieu social défavorisé et de leur affectation tout aussi précoce en CLIS appelées aujourd’hui Ulis école.
Dans un avis du Conseil économique social et environnemental (le CESE ) intitulé Une école de la réussite pour tous [8] Marie-Aleth Grard le démontre en s’appuyant entre autres sur une note de la Direction de l’évaluation de la prospective et de la performance (DEPP) de février 2015 qui dit qu’à l’école et au collège, les enfants en situation de handicap constituent une population fortement différenciée scolairement et socialement. Elle s’appuie aussi sur des statistiques réalisées. Ainsi parmi les enfants affectés en Ulis pour des troubles des fonctions cognitives, 6 % seulement viennent de milieu social favorisé, contre 60 % d’un milieu très défavorisé (soit un écart de 54 points).
A l’aune de ce nouveau cadre juridique et institutionnel et de ses risques de dérives, il s’agira donc de voir dans quelle mesure l’orientation d’élèves en dispositif Ulis collège révèle et masque à la fois des discriminations croisées liées à leur classe sociale - comme le dit le rapport du CESE - mais également aux origines ethniques de leur famille ainsi qu’à leur sexe. Il s’agira ainsi de se demander si les Ulis école et collège sont devenues de nouvelles filières ségrégatives sous couvert de volonté d’inclusion scolaire d’élèves en situation de handicap ou si ces nouveaux dispositifs, aussi imparfaits soient-il, ne sont pas une opportunité de prévenir le décrochage scolaire et de permettre à des élèves qui bousculent la norme scolaire de se faire quoi qu’il en soit une place à l’école, puis dans la société.
Dans un premier temps, je ferai l’état des lieux de l’Ulis collège où je travaille en présentant les élèves qui y sont orientés ainsi que leur famille. Je montrerai comment ils se représentent la catégorie "handicapé" dans laquelle l’institution scolaire les a fait entrer. Je présenterai ensuite le travail d’atelier dansephilo mené sur deux ans. Il vise à déconstruire cette catégorie "handicapé" et les stéréotypes et discriminations qu’elle recouvre. J’évaluerai enfin les effets et les limites de ces ateliers mis en œuvre pour redonner une place et une dignité à des élèves pour qui la catégorie "handicapé" est encore vécue comme un stigmate [9].
1. Etats des lieux
Le dispositif Ulis dont je vais parler est celui qui a ouvert à la rentrée 2015 dans une cité scolaire du centre de Paris. Il permet de scolariser en milieu ordinaire 11 élèves dont neuf garçons et deux filles. Cette proportion est celle de toutes les Ulis parisiennes. A Paris, plus de 66% des élèves en situation de handicap sont des garçons et en dispositif Ulis, le pourcentage est encore plus élevé. Parmi ces 11 élèves, 10 ne résident pas dans le centre Paris mais dans les quartiers Nord et à l’extérieur de Paris intramuros pour l’un d’entre eux ce qui implique une heure et demi de transport quotidien, en taxi pour les moins autonomes, en métro pour les autres. Le collège où ils sont affectés n’est donc pas l’établissement de secteur, comme le préconise la loi du 11 février 2005.
L’Ulis est une Ulis Troubles des Fonctions Cognitives. Ce vocable flou permet d’y faire se côtoyer des élèves, avec des difficultés et troubles divers : deux ont des troubles du spectre autistique, deux sont dyspraxiques avec un accès très différent au graphisme et à l’écrit, les autres - ainsi qu’ils le disent eux-mêmes - ont "un retard dans le cerveau". Ils sont, pour la plupart, en souffrance à l’école qui les a orientés vers le champ du handicap. Ils ont développé un sentiment de honte d’être en Ulis qui les maintient dans un entre-deux et leur fait vivre une expérience de liminalité [10] : ils ne se sentent ni vraiment inclus, ni vraiment exclus de l’école. Leur temps scolaire est en effet partagé entre des cours en milieu ordinaire - en fonction si possible de leur centre d’intérêt et de l’emploi du temps de la classe de référence où ils sont inscrits - et une scolarisation en dispositif Ulis qui doit leur apporter étayages, appuis et soutiens et mettre en place des projets spécifiques.
Se construire en tant qu’adolescent dans cet entre-deux et avec cette catégorie "handicapé" à laquelle ils se sentent parfois, malgré eux,
assignés, est très complexe. "C’est quoi mon handicap ? C’est quoi celui de
Brandon ? Celui de Marc-Jean, c’est la folie ? Est-ce qu’un jour je ne serai
plus handicapé ?" demandent-ils parfois. En tant qu’enseignante coordinatrice de l’Ulis, je n’évacue pas ces questions sensibles mais je préfère qu’ils cherchent par eux mêmes pourquoi et comment ils ont eu une reconnaissance de la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées), qui est la condition indispensable pour être scolarisé en Ulis.
J’ai pu constater qu’aucun d’entre eux n’a souvenir ni idée du processus. Le rapport du CESE, précédemment cité, fait état de la manière dont peuvent s’effectuer les orientations vers la Maison Départementale des Personnes Handicapées. Il se réfère pour cela au Master de Chloë Raffele, écrit en 2011 sous la direction de Mathias Millet sociologue à l’Université de Poitiers. Dans son mémoire intitulé La construction scolaire du handicap mental, Chloë Raffele, s’appuie sur l’étude de la population scolaire de trois ULIS. 80 % des élèves de ces classes sont issus de milieux populaires ou très défavorisés. 25 % de ces enfants vivent avec une mère seule et sans emploi. L’auteur a analysé le processus d’orientation de ces élèves. En résumé, ce sont les professeurs des écoles qui déclenchent la démarche d’orientation, puis le psychologue scolaire reçoit l’enfant et lui fait passer un test psychométrique. Un dossier est alors constitué avec différents acteurs, dont une assistante sociale qui rédige le volet social. L’accord des parents n’est pas toujours clairement exprimé, le dossier est ensuite examiné par la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapés (CDAPH) de la MDPH. Cet examen s’appuie fréquemment sur le test psychométrique et se fait très souvent sans les parents [11].
Les parents des élèves du dispositif Ulis dans lequel je travaille n’ont majoritairement pas pour langue première le français. Ils viennent pour certains de pays en guerre ou en crise et sont en exil en France. Ils ont fait confiance à l’Education nationale dont la complexité de l’organisation et des parcours leur échappent. Ils n’ont pas nécessairement mesuré ce que signifie être orienté vers la Maison Départementale des Personnes Handicapées et ce qu’implique d’être scolarisé en Ulis. Cette orientation repose parfois sur un malentendu. Lors d’une Equipe de Suivi de Scolarisation (ESS), il a été ainsi nécessaire d’expliquer, par le biais d’une interprète, à une mère d’élève dont le pays d’origine est le Sri Lanka, pourquoi son fils qui réussit en Ulis ne peut pas suivre tous les cours de sa classe de 5° de référence, pourquoi il passera le Certificat de Formation Générale et non le brevet des collèges, pourquoi il n’ira ni en lycée général ou technologique et ne pourra pas se présenter au baccalauréat. A l’issue de la 3° Ulis, trois orientations sont possibles : un CAP en lycée professionnel, une Ulis lycée professionnel ou un IMpro (Institut Médico-Professionnel). Une forte émotion chez la mère a accompagné cette explication. A l’issue de l’ESS, l’interprète a rendu compte de l’humiliation des familles sri-lankaises à avoir un garçon handicapé et de l’inquiétude de cette mère quant à la future vie affective, sexuelle et familiale de son fils et quant à son avenir professionnel et social. Ainsi que le démontre Charles Gardou dans l’ouvrage collectif Le handicap au risque des cultures, variations anthropologiques [12], le handicap reste encore la marque d’une humanité diminuée et le signe d’une faute. Ceci est valable pour les pays d’Afrique Subsaharienne ; de Madagascar, ou de Haïti ou encore d’Afrique du Nord dont viennent les familles. Ceci est également valable pour les pays européens et pour la France. La reconnaissance de statut d’enfant handicapé avec déficience intellectuelle fait violence aux familles. Elle fait également violence aux élèves de genre masculin à l’adolescence car il contrevient aux codes de la virilité fondés sur l’idée de force alors que le handicap est synonyme, dans les imaginaires et dans les cultures diverses, de faiblesse et de défaillance. Il paraît mieux vécu par les deux filles.
2. Penser et expérimenter des pratiques non discriminantes
Mon travail d’enseignante coordinatrice d’Ulis consiste avant tout à essayer d’apaiser la violence faite par l’assignation à la catégorie "handicapé", à restaurer l’estime de soi en misant sur des pratiques pour faire percevoir le handicap, non pas comme une singularité marquée par la déficience ou par le manque mais comme une singularité positive. Au préalable, je considère que chacun et chacune est éducable et que rien n’est joué d’avance même si les parcours scolaires et professionnels semblent pré-tracés. Je me refuse à considérer que mes élèves qui ont entre 13 et 15 ans ont un "niveau de CE2" comme on l’entend parfois. Je prends en compte le fait qu’il s’agit d’adolescents et je veille à trouver des activités pédagogiques adaptées à leur âge, ce qui demande de fabriquer la plupart des outils et évaluations. Il s’agit pour moi aussi de prendre en compte le fait que le français n’est pas leur langue maternelle et qu’elle n’est pas celle qu’ils parlent à la maison même s’ils semblent bien maîtriser le français à l’oral. Je prends en considération qu’un certain nombre de codes qu’ils soient écrits, scolaires et sociaux leur sont encore étrangers et que c’est là aussi que réside aussi leur "handicap".
Ainsi, j’ai davantage misé sur des pratiques interactives et coopératives que sur l’individualisation pédagogique pour faire entrer mes élèves dans les apprentissages socio-cognitifs. Je voudrais rendre compte de l’une d’entre elles qui vise à déconstruire les stéréotypes dans lesquels ils se trouvent enfermés et à leur faire dépasser leur sentiment d’infériorité. Il s’agit des ateliers dansephilo [13]. lls sont conçus comme une expérience qui "contribue à se dégager de l’idée martelée d’une préfiguration du monde" [14].
Pour les ateliers philo, mon choix s’est porté sur la Discussion à Visée Démocratique et Philosophique (DVDP) [15]. Je l’ai choisie pour l’expérience démocratique qu’elle amène à faire en rendant les participants actifs et acteurs et en ne les assignant pas une place fixe. Celle-ci varie en effet en fonction des séances où on est tour à tour président, maître du temps, reformulateur, discutant, observateur, synthétiseur, la place de l’animatrice m’étant toutefois réservée. Il s’agit par là de montrer à mes élèves que le handicap ou leurs origines sociales et ethniques ne les assignent pas nécessairement à une place fixe, celle de l’élève en très grande difficulté scolaire qui met dans une position d’infériorité à l’école. Les ateliers philo sont là pour prouver leur capacité de réflexion et d’expression et leur possibilité de se considérer et d’être considérés comme des "être pensants et parlants" malgré leurs troubles cognitifs et déficiences intellectuelles actés. Mon travail est dès lors à la fois pédagogique et politique. Politique au sens où Jacques Rancière l’entend : il s’agit "de reconfigurer le partage du sensible qui définit le commun d’une communauté, à y introduire des sujets et des objets nouveaux, à rendre visible ce qui ne l’était pas et à faire entendre comme parleurs ceux qui n’étaient perçus que comme des animaux bruyants" [16].
Je voudrais prendre pour exemple un atelier danse-philo mené à partir d’un spectacle de danse d’Arthur Perole intitulé Rocking Chair vu dans le cadre d’un projet inclusif mené par l’académie de Paris : le projet Chaillot en partage-réussir ensemble. J’ai mis en place un atelier qui reprenait un processus vu lors du spectacle. Par groupe de 4, les danseurs sont reliés les uns aux autres par la main. Dans cette configuration, il s’agit d’expérimenter différentes combinaisons pour se mouvoir et avancer vers un point donné. "Comment se démêler du handicap ?" est la question que l’un d’eux a posée à l’issue de cet atelier et dont ils ont discuté dans le cadre rassurant que pose la DVDP. Trois choses sont ressorties de cette discussion qui a eu lieu le 16 mars 2017.
Le handicap dans leur quête identitaire d’enfants de migrants est source d’angoisse diffuse et vient se rajouter à celle suscitée par leur place et celle de leur famille dans la société française.
Le handicap est une épreuve et une énigme : les élèves ne comprennent pas pourquoi et comment ils sont devenus handicapés. Leur handicap est d’autant plus difficile à concevoir qu’il est invisible contrairement à d’autres types handicaps, tel le handicap moteur ou sensoriel.
Le handicap est perçu comme un écart par rapport à la norme scolaire. Mes élèves se sentent handicapés dans la classe au moment des apprentissages mais ils ne se considèrent pas nécessairement en situation de handicap à l’extérieur de la classe. Ils ont le sentiment que l’école est pour beaucoup dans leur situation de handicap.
A l’issue de ce travail de discussion, nous avons engagé un travail de recherche autour du mot handicap et de son étymologie. Les élèves ont découvert que le mot venant d’une expression anglaise "hand in cap" [17] implique les notions de compensation et d’équité. Mes élèves ont également découvert que, dans d’autres langues, le mot handicap n’a pas nécessairement une connotation péjorative car il signifie "autrement capable" [18] ou "autrement valide" [19]. J’ai alors demandé d’énoncer à mes élèves ce qu’ils étaient capables de faire à l’école et ils se sont aperçus qu’ils étaient capables de beaucoup. Cependant, leurs capacités ne sont pas nécessairement reconnues par mes collègues de collège qui continuent de considérer que l’écart entre eux et les élèves dits "ordinaires" est trop important pour qu’ils puissent être inclus dans les matières dites fondamentales et qu’ils puissent être évalués dans leur cours. C’est particulièrement flagrant en mathématiques et dans une mesure moindre en français. Ils sont tolérés dans certaines disciplines mais ils sont exclus de cours dès que le comportement ne répond pas aux attentes de la norme scolaire. En classe ordinaire, les élèves du dispositif sont en position d’infériorité et de dépendance dans la mesure où ils sont accompagnés par une AEShco (Accompagnant-e d’élèves en situation de handicap en fonction collective) ou un élève tuteur désigné par l’enseignant. Cette situation d’accompagnement, qui peut être utile pour les contenir et leur permettre de suivre le cours, est mal vécue par des élèves en pleine construction adolescente et en recherche d’autonomie.
On peut dire que les élèves du dispositif Ulis ne sont pas en règle générale considérés comme des élèves à part entière et qu’ils n’y sont pas traités comme les autres élèves, ce qui génère chez eux un sentiment très fort d’injustice [20]. En témoigne par exemple les bulletins scolaires qui n’étaient pas remplis lors du dernier conseil de classe du dispositif. Comme ils ne sont pas considérés comme des élèves à part entière, ils ne se comportent non plus comme des élèves à part entière et contreviennent aux règles de l’école.
Conclusion
On peut dire que l’orientation en Ulis est plutôt mal vécue par mes élèves et qu’il ne s’agit que très rarement d’une orientation choisie et construite avec les familles. On peut avancer qu’il s’agit parfois d’une affectation destinée, dans une certaine mesure, à soulager la souffrance des enseignants et enseignantes face à des élèves dont la difficulté scolaire est grande et dont le comportement à l’école est problématique. Il s’agit d’élèves dont les parents ne maîtrisent pas les codes de l’école française. Il y a donc certainement une vigilance à avoir quant à la pertinence des orientations vers la MDPH et vers les filières ASH qui mettent en route de nouvelles discriminations et de nouvelles formes d’exclusion pour des élèves de sexe masculins et qui sont " black ou beurs."
Si les dispositifs Ulis témoignent que l’école est bien encore un espace discriminatoire et ségrégatif, ceux-ci sont aussi sûrement le lieu où certains élèves hors-norme scolaire peuvent se trouver une place à l’école et à se penser quoi qu’il en soit un avenir professionnel et social. En ce qui me concerne, mon objectif est que les élèves d’Ulis ne soient pas condamnés à l’assistanat et à une forme de mort sociale à leur sortie de l’école. Il s’agit d’essayer qu’ils deviennent des êtres résilients, capables d’empathie et d’empowerment. C’est là le travail des ateliers danse-philo qui questionne la norme et les différences à travers notre corps qui est notre "en-commun" [21]. Ne pas être dans les normes est une souffrance à l’adolescence mais peut devenir un levier pour modifier l’existant et pour permettre à la société et à l’école d’avancer. Cela passera aussi par la prise de conscience dans le corps enseignant des discriminations croisées dont sont victimes certains élèves orientés vers les filières ASH (Adaptation et scolarisation des élèves en situation de Handicap) et par leur déconstruction. C’est peut-être en reconnaissant davantage que l’altérité fait partie de notre humanité et en n’en ayant pas peur, en essayant de la comprendre en soi et chez les autres qu’une école moins discriminante pourrait exister. Former les enseignants à une école qui émancipe et non qui classe et formate les individus, promouvoir une éducation inclusive qui est nécessairement, une éducation partagée avec les parents, développer des pratiques pédagogiques moins ethnocentrées, évaluer davantage l’oral, sont peut-être les conditions pour que soient davantage gommés les stéréotypes et les discriminations à l’école. C’est d’ailleurs la recommandation 21 du défenseur des droits dans son rapport du 18 novembre 2016 [22] :
Le Défenseur des droits recommande au ministère de l’Education nationale de systématiser la formation aux stéréotypes et aux discriminations dans la formation initiale et continue des acteurs de l’Ecole et notamment des enseignants. Il recommande également de donner aux élèves et à leurs familles les moyens de faire des choix éclairés et informés, en luttant contre le défaut d’information, l’autocensure et les stéréotypes, dans le cadre des orientations scolaires.